Mot d’humeur en mode humour
Chers Voreysien/nes,
En ce dimanche 30 février 2052, année de mon propre centenaire, j’ai le plaisir et l’honneur d’inaugurer dans notre bonne vieille cité rebaptisée Vorey-sur-Gazon (la rivière Arzon étant asséchée), le tout nouveau “Musée des inutilités”, sis dans les locaux historiques de l’antique “La Débrouille” aujourd’hui disparue.
Ce lieu nous raconte une histoire, notre histoire pas si lointaine où chacune et chacun, en dépit d’un pouvoir d’achat le plus souvent fort modeste, avait l’art de s’encombrer de tout un arsenal d’engins, ménagers notamment, qui avait pour but, semble-t-il, d’épargner à leurs propriétaires tout à la fois l’usage de leurs méninges et de leurs propres mains.
C’était le temps béni de l’opulence et de la douce paresse. Mais ces merveilleux engins avaient malgré leur haute sophistication et leur promesse chimérique de libération de l’esprit une fâcheuse tendance à se mettre – pour une soudure litigieuse, un ampérage sous-estimé – sans aucun préavis, en grève pour une durée in-dé-ter-mi-née.
Dans ce contexte où, en dépit de ces facilités domestiques, affleuraient dans la population tentions et frustrations, le lieu de vie “La Débrouille” faisait alors office d’agent conciliateur/réparateur du lien social bien autant que du cordon d’alimentation défectueux ou du roulement à billes enroué et si elle parvenait parfois, il faut le reconnaître, à remettre en état de nuire l’engin, le plus souvent ce dernier lui était offert, ou tout bonnement abandonné. Et c’est ainsi qu’au fil
de ces ultimes années d’opulence s’est constitué ce merveilleux amas d’appareils aujourd’hui obsolètes mais témoins précieux d’une époque révolue où la machine pensait, baisait et rêvait à notre place.
Aujourd’hui, libérés de tout ce bric-à- brac, levons nos verres d’eau en poudre à la convivialité bricolière de feu “La Débrouille” qui fut le ferment d’une paisible révolution.